La critique est-elle la puissance des impuissants ?
Une courte discussion m'a fait longuement réfléchir sur l'objectivité de la chronique et la démarche de la critique.
Ce post ne sera pas sarcastique comme j'ai pu l'être ici et n'abordera pas la façon dont un auteur accepte les critiques sur ses récits. Non, je parlerai [strike]un peu[/strike] sérieusement de la démarche de la critique/chronique, celle de donner son avis, ce petit ou grand pouvoir que nous pouvons prendre l'espace d'un instant en jugeant qu'une oeuvre, qu'un produit, qu'un individu parfois, est bon ou mauvais. :whistle:
Qui sommes-nous pour critiquer ?
Quand je vais dans un restaurant où le service est pitoyable et la bouffe dégueulasse, je suis la première à me plaindre et à "critiquer" le restaurant ou le personnel. Mais dans le fond, en quoi mon avis sera-t-il objectif ? Il ne concerne que ma petite personne, mon petit monde dérangé par un mauvais plat, un serveur désagréable, un mauvais placement de table, sans parler de mon humeur du jour, alors que mon voisin de table a pu trouver le restaurant et le service fabuleux.
En réalité, quelles sont les limites de l'objectivité ? Et qui sommes-nous pour critiquer telle ou telle chose, voire telle ou telle personne ?
En tant qu'auteur, il m'a toujours semblé logique et normal de ne pas rentrer dans le système de critiques des autres auteurs, exception faite quand je lis une oeuvre remarquablement bien écrite, j'aime le faire savoir à l'auteur. Et pourquoi critiquer le bon et pas le mauvais me direz-vous ?
Parce que j'estime que critiquer le mauvais serait tout bonnement me mettre au-dessus de l'auteur que je critique. Et qui suis-je pour juger que son texte est de qualité ou non ?
Je ne suis qu'un lecteur lambda, quand bien même je peux avoir des diplômes en créations littéraires ou que je sorte de la Sorbonne, aucun statut, aucun diplôme, aucune expérience ne me donne le droit de dire que tel ou tel texte, pardonnez l'expression "c'est de la merde", même si ça l'est aux yeux de la majorité ou de la norme !
Pourquoi je ne prends pas ce droit ? Parce qu'un auteur, et tous les auteurs, quels que soient les sujets qu'ils abordent, font de leur mieux pour écrire leur texte et le publier. Écrire un livre, le finir, exige de nombreuses qualités, dont une absolument essentielle : la volonté.
Je ne parle pas, bien sûr, de l'orthographe, de la syntaxe et de la structure littéraire, mais de la démarche d'écrire, du temps consacré à l'écriture, à la relecture, à la publication. 2 Français sur 5 prétendent écrire un livre. Combien en arrivent au bout ? Combien publient leur texte ?
Si pour Jamie et moi le fait de publier un récit est devenu une sorte d'habitude, un exercice de plaisir quotidien, nous savons comment nous avons commencé. Nous nous souvenons du stress, de la pression, de l'angoisse que nos démarches ont suscitée quand nous avons débuté le processus de la publication. Parce que oui, quoi qu'en disent certains, en plus de la volonté, publier un livre exige un brin de courage et d'humilité.
Faire une mauvaise critique d'un livre, c'est critiquer son auteur, sa démarche, c'est cracher sur ce qu'il aura mis des mois, voire des années à accomplir dans une oeuvre où il aura donné, parfois sans compter, une énergie considérable, où il aura livré une part de lui, de son intimité. Et là dans un élan franc d'évidence, je me dis "Mais putain, qui sommes-nous pour juger cela ?". Pour qui se prennent les gens qui critiquent et crachent leur venin sur certains auteurs ?
Voilà un proverbe qui me parle nettement. Pour critiquer, faut-il déjà soi-même pratiquer pour mesurer la difficulté de la pratique.
C'est bien facile de dire, "Ce bouquin est à chier".
Ok, et donc tu peux faire mieux ?
Ne pas aimer un livre n'engage que soi autant que ne de ne pas aimer une personne qu'on nous présente. Qu'est-ce qui ne nous revient pas chez elle ? Ce qu'elle porte ? Pourquoi je n'aime pas ce bouquin ? À cause de sa couverture ?
Oui, je sais, un livre n'est pas une personne, mais un livre a une âme, un livre, un texte, est le reflet de l'âme de son auteur, de ses croyances, de ses espoirs, de sa personnalité, de ses rêves, de ses fantasmes, de ses valeurs, etc...
En ce sens, l'avis ne peut être objectif puisque l'avis évolue au gré du temps, de la maturité, des expériences de chacun. Essayez donc de revoir un film que vous avez adoré dans les années 80 et voyez comme vous avez mûri, comme vous n'appréhendez plus du tout ce film comme il y a 15 ou 20 ans. Il en va de même pour les amis que vous avez fréquentés quand vous étiez jeune et que vous revoyez, ne serait-ce, que 10 ans plus tard.
Si vous êtes auteur, faites donc l'expérience de relire vos vieux écrits, voyez vous même comme vous serez un juge impitoyable avec vos propres récits.
Parce qu'en tant qu'auteurs, nous sommes bien pires critiques qu'un lecteur lambda et juger notre propre livre c'est aussi juger la personne que nous étions au moment où nous avons écrit notre texte. Alors si nous ne devons pas être un bourreau trop cruel envers nous-mêmes, pourquoi l'être avec les autres ?
Et la critique constructive dans tout ça ?
Comment souligner à l'auteur ce qui est bon de ce qui ne l'est pas ? Encore une fois, où sont les limites de l'objectivité ? Un lecteur pourra trouver un texte trop érotique quand un autre jugera qu'il ne l'est pas assez !
Suis-je objective quand je dis que la série "Once Upon a Time" est plus que moyenne, pour ne pas dire complètement "nulle à chier" ?
Je peux trouver dans l'heure une dizaine de personnes qui vont me tomber dessus et argumenter pour me dire qu'ils la trouvent géniale. Ce qui ne m'empêchera pas d'argumenter pour confirmer ma vision des choses. Même si l'argument rend la critique constructive, elle n'engage que notre avis personnel, notre "Me, my fuckingself and I" !
Et sinon les mauvaises critiques ça sert à quoi ?
Dans les "4 Accords Toltèques" de Don Miguel Ruiz (mon livre de chevet), l'un des 4 accords est "Que votre parole soit impeccable".
Je cite :
La parole est si puissante qu'un seul mot peut changer une vie ou détruire l'existence de millions de personnes [...] Prenez Hitler : il a semé des graines de peur, qui se sont développées avec force et ont réussi à provoquer une destruction massive. [...] Une peur, un doute semé dans notre esprit peuvent créer une succession dramatique d'événements. Un seul mot est comme un sort et les hommes utilisent la parole comme des magiciens jetant des sorts les uns aux autres. Exemple : "Regarde cette fille comme elle est moche". La fille en question entend cela, croit qu'elle est laide et grandit avec l'idée qu'elle n'est pas belle.".
La critique est parole. Elle a ce même impact sur chaque individu, sur chaque auteur qu'on critique. Vos mots, votre jugement peut toucher une personne ou un auteur à tel point que sa vie peut en être changée. Il pourrait non seulement arrêter d'écrire, mais perdre complètement confiance en lui alors que la pratique aurait fait de lui un meilleur auteur expérimenté.
On dit souvent de ne pas faire aux autres ce qu'on ne souhaite pas qu'on nous fasse. Et bien il en va de même pour la critique. Quitte à critiquer, demandez-vous comment vous réagiriez si une personne vous disiez ce que vous-même lui écriviez. Quelle serait votre réaction face à vos propres mots ? Pensez toujours à celui qui recevra votre message. Sera-t-il empoisonné ou lui ferez-vous un cadeau ?
Et dans un sens, les personnes qui ne reçoivent aucune critique sont celles qui ne disent rien, ne font rien, ne sont rien..
Et vous en recevez-vous ?
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