Have Faith
9,90 €
- Taille du fichier : 2208 KB
- Nombre de pages de l'édition imprimée : 286 pages
- Édition : 1 (31 mai 2017)
- Langue : Français
- ASIN: B071KCY1QX
En bonus, découvrez les premières pages du roman :
Prologue
Tout le monde meurt un jour. Personne ne peut rien y faire si ce n’est repousser l’échéance. Tout le monde doit mourir, c’est un fait. Vous, moi, nos proches, rien ni personne n’y échappe.
Nous vivons avec la mort mais quelle importance lui donnons-nous ? On regarde les actualités : une femme a tué ses trois enfants ; un 747 a explosé au-dessus de l’Atlantique ; des touristes pris en otage ont été fusillés. Ces annonces sont quotidiennes et plus ou moins étayées selon les intérêts politiques du moment. Qui réagit à cela ? Personne. Hormis se sentir compatissant, peiné, choqué l’espace de quelques minutes, ces gens qui meurent font partie du décor… triste constat mais réaliste. Comment pourrions-nous vivre si nous n’étions pas insensibles à ces tragédies ?
Quoi qu’il en soit, à 26 ans, on pense à tout, sauf à mourir. On se croit invincible, intouchable. On songe à son avenir, on termine ses études, on commence une carrière, on s’engage, on comprend le sens du mot « aimer », on projette d’avoir un premier enfant…
A 26 ans, le monde nous appartient, du moins, c’est ce que je pensais.
Chapitre 1: A jamais
J’étais heureuse de voir Sarah ainsi, égayée, le sourire constamment aux lèvres et riant à la moindre plaisanterie. Nous avions passé la soirée avec nos amis d’enfance. Danielle et Samuel s’étaient mariés trois ans plus tôt. Tous les quatre nous nous étions rencontrés au collège sans jamais nous perdre de vue. Ce soir là, Sarah et moi fêtions nos huit ans de fiançailles.
Pour l’occasion, nous avions réservé une table dans un petit restaurant situé dans la banlieue de New York : le Grafton. Un endroit chaleureux et tenu par une famille d’Irlandais venus s’installer en ville depuis plusieurs générations.
Les discussions s’étaient tournées vers notre passé commun, vers nos années lycée à Northfolk en Californie. Danielle et Sarah avaient étudié à UCLA, Samuel avait obtenu une bourse pour Yale et pour ma part, je m’étais arrêtée après le lycée. Je n’aimais pas étudier mais j’aimais passer du temps avec Sarah. Après l’obtention de notre diplôme, j’avais enchainé les petits boulots pour payer les quelques factures de notre appartement. A cette époque, je me fichais des projets de carrière, de l’ambition professionnelle. Tout ce qui importait était de profiter de la vie avec Sarah…
J’avais eu raison.
Nous quittâmes le Grafton aux alentours de onze heures. La rue était déserte. Seuls, quelques fracas de bouteilles de bière triées à l’arrière des bars rompaient le silence. Il me tardait de rentrer chez nous, de rejoindre notre nouvel appartement où nous habitions depuis six mois. Sarah l’avait entièrement décoré. Je m’étais occupée de la peinture et de la chambre du bébé… Sarah était enceinte de six mois, portait notre enfant, du moins, je le voyais ainsi, même si elle avait le rôle évident de la mère ! Moi aussi je tenais le rôle d’une future mère et je n’en revenais pas…
Nous avions rejoint Vancouver l’année précédente pour entreprendre les démarches en vue d’une insémination artificielle. Notre rêve de fonder une famille se réaliserait bientôt et je me surprenais à compter les jours… Sarah glissa sa main dans la poche arrière de mon jeans et nous marchâmes tranquillement en profitant de l’air frais.
— J’ai pas du tout aimé comment la serveuse te regardait ! m’annonça-t-elle en laissant s’échapper un petit nuage de buée.
Je ne pus que sourire. Sarah était d’une jalousie maladive. Là où Samuel et Danielle se disputaient régulièrement, je me rassurais des remarques de ma petite amie. Je considérais la jalousie comme un sentiment normal lié à l’amour. Je souffrais quand un homme posait son regard sur Sarah. Je lui répondis, taquine :
— Quelle serveuse ?
Sarah roula des yeux et m’envoya une petite tape du revers de sa main dans le bas ventre.
— Te fiche pas de moi, t’as bien vu qu’elle était aux petits soins pour toi toute la soirée.
Je préférai couper court pour la rassurer :
— Je n’ai pas remarqué.
Ainsi, le sujet serait clos jusqu’aux prochains regards de jolies filles qui se poseraient sur moi par inadvertance. Nous arrivâmes à la voiture. Sarah prit ma main et me serra contre elle en enlaçant ses bras autour de mon cou :
— Tu sais de quoi j’aurais envie là tout de suite ?
Mon esprit mal placé formula des conclusions hâtives que je dus chasser au plus vite. Je répondis d’un air coquin en la gardant bien contre moi :
— D’un gros câlin agrémenté de framboises et de chantilly ?
Le regard de Sarah brillait. Elle arborait une expression à la fois taquine et aguicheuse :
— Non… De chocolat.
— Tu sais qu’on sort de table ?
— Tu sais que je suis très enceinte de toi ?
Comment pouvais-je résister à pareil argument ? Je lui souris et me reculai afin d’ouvrir sa portière.
— Je vois… On trouvera bien un truc ouvert sur la route pour t’en acheter.
— T’es un ange.
Sarah s’installa en affichant une expression à laquelle je ne pouvais résister. Mon petit sous-entendu n’avait pas eu l’effet escompté. Depuis quelques semaines, je devais refouler mes envies incessantes, mon obsession de lui faire l’amour. Son corps et ses tendres soupirs me manquaient mais j’attendrais. Si Sarah rencontrait quelques désagréments dus à sa grossesse, je devais aussi les gérer. Il y avait d’abord eu les nausées : Sarah m’avait maudit de l’avoir encouragée à porter notre enfant (quand elle ne m’accusait pas d’avoir refusé d’être enceinte). Ses sautes d’humeurs cyclothymiques étaient aussi difficiles à gérer : elle voulait, ne voulait plus, riait, pleurait et ce, en moins d’une heure. Enfin, sa prise de poids, que je trouvais adorable, la rendait complètement dépressive et déprimée. Mais je m’étais préparée à tout cela, la soutenais et parvenais à la rassurer.
Je refermai la portière coté passager et contournai notre voiture vers la place conducteur. Cependant, je n’eus pas le temps d’ouvrir le véhicule : un homme me saisit le bras et me plaqua dos contre la voiture. Mon cœur s’affola aussitôt. Je rivai mes yeux sur mon agresseur mais une cagoule qui dissimulait son visage m’empêcha de le détailler. Son regard ! Je ne l’oublierai jamais… Noir, agressif, empli de haine… Mon cœur s’emballa quand je sentis le métal froid de son arme se poser sur mon front.
— Tu vas me filer ton fric et les clefs de ta caisse.
Sarah était dans la voiture et je redoutai qu’elle sorte. Ma femme enceinte était derrière moi, portait notre enfant. Cette évidence se répétait dans mon esprit malgré le canon posé sur mon front. Je répondis sans réfléchir :
— Ok… Attends.
Mes mains tremblaient, mes jambes flageolaient. L’homme pressa le canon sur ma peau et haussa le ton.
— Grouille ou je te descends !
Je n’eus pas le temps de fouiller dans ma poche pour sortir mon portefeuille et entendis ce que je redoutais. Derrière moi, Sarah ouvrit la portière et implora :
— Je vous en prie, baissez votre arme, on vous donnera tout ce que vous voulez…
Notre agresseur porta aussitôt le canon de son revolver dans sa direction :
— Bouge-pas toi ! Laisse ton sac dans la caisse !
Mon sang se glaça et tout se passa très vite. La panique s’empara de moi. Dans un mouvement, je détournai son arme, en maintenant le canon vers le bas. Peu m’importait que cet homme soit plus fort que moi ou qu’il me tire dessus, du moment qu’il ne blessait pas Sarah. Dans la lutte, un coup de feu retentit et l’homme s’enfuit en courant. Je restai figée en le regardant s’éloigner puis disparaître au carrefour d’une rue. La peur ne me quitta pas, je ne cessais de trembler sous le coup de mes émotions. Je me tournai aussitôt vers Sarah et m’assurai qu’elle n’était pas blessée :
— Ca va… Il est parti, c’est fini ma puce.
Je devais me calmer pour ne pas l’inquiéter. Elle s’approcha de moi sans me regarder et je suivis son regard tourné sur le sol. Un corps gisait sur le trottoir, mon corps... Le temps sembla s’arrêter à cette seconde précise. Mon cadavre gisait aux pieds de Sarah, le sang s’écoulait de ma chemise blanche et se répandait sur le bitume. Je niais l’évidence et relevai vivement mes yeux sur Sarah :
— Non… Je suis là, ma puce !
Elle s’agenouilla, tremblante, près de ce corps qui était pourtant le mien. Elle ramena sa main sur ma blessure tout en appelant le 911 :
— Allô…
Le ton cassé de sa voix m’anéantit plus que je ne l’étais déjà.
— J’ai besoin d’une ambulance. Ma… Ma petite amie… On lui a tiré dessus. Je suis... Je suis sur Grafton Street.
Mon sang s’écoulait entre les doigts fins de Sarah. Cela ne pouvait être qu’un cauchemar. J’allais me réveiller ! Je refusais la réalité, relevai mon regard vers celui imbibé de larmes de Sarah. J’étais figée, incapable de parler tant ce qui se passait relevait de l’impossible. Sa voix anéantie résonna :
— Je suis là… Tiens bon bébé ! Je t’en supplie, me laisse pas toute seule.
Comment cela était-il possible ? Elle regarda autour de nous. Je l’imitai. Que faisaient les secours ? Ils devaient me sauver mais aucune sirène ne résonnait. Je m’accroupis près de Sarah, voulus poser ma main sur la sienne mais celle-ci passa au travers. Je paniquai, mesurai que Sarah ne me voyait pas, ne m’entendait pas… J’étais morte.
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